« Le vieil homme entrant au pays des ombres », « Trois personnages au seuil
du pays des ombres » et « Les dormeurs » existaient déjà quand Michel Madore
les a fait se rencontrer autour d’une toile écrue pour composer un retable
de carême à Notre-Dame de la Sagesse.
Et les voici entraînés dans l’aventure de s’exposer au pilon des regards dans
le creuset d’une chapelle, vivante de sa communauté qui célèbre et prie. Humblement, ils ne revendiquent pas la première place : l’autel et la croix
les masquent toujours un peu. Et la toile du centre, vide comme le tombeau
du Ressuscité, s’anime lors de la messe quand le prêtre vient y inscrire
l’orient du rite fondateur.
Ce qui parait de marbre n’est que papier fin, fragile, subtile, encollé et appliqué
sur la toile. Le fusain et la sanguine à peine – on aimerait parler du charbon
et du sang – y laissent la trace ténue d’une quête essentielle : Michel Madore accueille à la pointe de son être ce que lui soufflent les grondements intérieurs.
Il en retirera encore le superflu.
« Le pays des ombres » se traverse, il n’a pas le dernier mot, même lorsque
les veilleurs s’endorment à l’instar des apôtres choisis par le Christ à Gethsémani. Lui veille, bienveillant, dont la pauvre présence sacramentelle nourrit ceux
qui demeurent confiants, croyants. Devant cette composition qui s’accorde
au Mystère.